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03

mai 2024

LE CERVEAU DES PONGISTES

Publié il y a 2 semaines par karlservices

Attention, vitesse de réaction… Les examens d’imagerie cérébrale et électroencéphalographiques attestent les capacités exceptionnelles des champions de tennis de table.

Le cerveau des pongistes, fascinant sujet de recherche

Lien vers l’article : https://www.lemonde.fr/article-offert/nbdfkpuehwln-6231118/le-cerveau-des-pongistes-fascinant-sujet-de-recherche?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=ios&lmd_source=default

Attention, vitesse de réaction… Les examens d’imagerie cérébrale et électroencéphalographiques attestent les capacités exceptionnelles des champions de tennis de table.

Publié hier à 06h00, modifié hier à 09h25 Temps de Lecture 3 min.

Alexis Lebrun (à droite) frappe un retour sur son frère Felix (à gauche), lors de la finale du simple masculin de tennis de table du Championnat de France, au stade FDI de Montpellier, le 24 mars 2024. SYLVAIN THOMAS/AFP

Dix mille pas et plus. Que verrait-on dans la tête des frères Lebrun, Félix et Alexis, de Simon Gauzy, de Jia Nan Yuan, de Prithika Pavade, des sœurs Lutz, Charlotte et Camille… bref, le gratin du tennis de table français, en les soumettant à une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale ou à un électroencéphalogramme ? Si ces examens ne semblent pas être à l’agenda de ces joueurs de l’équipe de France, le cerveau des pongistes de haut niveau intéresse de plus en plus les scientifiques. Ces athlètes impressionnent notamment par leurs capacités d’attention, d’anticipation, de coordination, de réactions visuo-motrices…

Composantes de la performance dans toutes les disciplines sportives, les aptitudes cérébrales semblent particulièrement cruciales en ping – nom moderne du tennis de table. Certes, la vitesse de la balle, qui peut atteindre les 200 kilomètres-heure en sortie de raquette chez les élites, est loin du record du volant de badminton, désormais établi à 565 kilomètres-heure, mais la faible distance entre les joueurs impose des temps de réaction très courts, moins de 200 millisecondes.

En Chine, berceau des meilleurs joueurs mondiaux, des chercheurs ont recours, depuis plusieurs années, à des techniques de neuro-imagerie pour percer les secrets de leurs champions. Deux articles ont ainsi été publiés sur le sujet, en mars. Dans le premier, paru dans la revue scientifique Brain Research, l’équipe a étudié par IRM à haut champ (7 teslas) les caractéristiques anatomiques et fonctionnelles du cerveau de vingt pongistes de niveau national. Comparés avec des témoins, ces joueurs d’élite ont une meilleure connectivité des aires cérébrales, qui se traduit notamment par une organisation plus structurée de la substance blanche, en particulier des fibres nerveuses impliquées dans des fonctions motrices et cognitives comme l’attention.

Dans Neuroscience, d’autres chercheurs chinois rapportent des données sur les mécanismes de l’anticipation. En analysant leur cerveau par IRM fonctionnelle, lors d’un exercice de prédiction de la trajectoire d’une balle sur une vidéo, ils ont pu distinguer les joueurs experts des novices avec 90 % de fiabilité, par des différences au niveau de plusieurs zones (cortex moteur, cortex préfrontal…).

La vitesse de perception visuelle fait la différence

« Ces deux études et d’autres, publiées ces dernières années dans des revues sérieuses, vont dans le même sens, résume le neuroradiologue Charles Mellerio (GHU Paris psychiatrie & neurosciences). Elles montrent que la pratique intensive du tennis de table induit des modifications cérébrales, avec un meilleur transfert des informations. Cela se traduit par une amélioration des performances visuo-spatiales et de certaines fonctions cognitives, dont l’attention et les fonctions exécutives impliquées dans la prise rapide de décisions. » Selon le spécialiste, cette corrélation entre plasticité cérébrale et entraînement intensif est à rapprocher de celle qui est observée en imagerie chez des musiciens professionnels, qui portent sur d’autres zones cérébrales.

Au Luxembourg, le chercheur Thorben Hülsdünker (Lunex) explore, lui, les réactions visuo-motrices de jeunes espoirs de badminton et de ping. Pour cela, il mesure leur activité cérébrale et leur temps de réaction par électroencéphalogramme et électromyogramme, lors d’exercices spécifiques sur un écran, avec des cibles en mouvement.

Dans ces deux sports, il a pu montrer que c’est surtout la vitesse de perception visuelle qui fait la différence entre les athlètes, la rapidité du système moteur jouant un rôle peu important. Convaincu que ces capacités pourraient être spécifiquement entraînées, Thorben Hülsdünker teste un système de lunettes stroboscopiques. Son principe : amener le sportif à utiliser plus efficacement les informations visuelles pour réduire ses temps de réaction.

Dans deux études menées auprès de joueurs de badminton de haut niveau pendant quatre et dix semaines, un entraînement stroboscopique a prouvé son efficacité en améliorant de manière significative le temps de réaction. Cependant, dans une autre étude chez des pongistes, les effets positifs à court terme pendant l’échauffement n’ont pas pu être confirmés.

Les bénéfices observés chez des sportifs de haut niveau et en bonne santé ont-ils une chance d’être retrouvés lors d’une pratique moins intensive, chez des personnes avec une maladie neurodégénérative comme Alzheimer ou Parkinson ? Si les témoignages de terrain sont enthousiastes, des données cliniques manquent encore pour confirmer que le ping est, chez tous, le meilleur sport pour le cerveau.

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« Il y a eu très peu d’études chez des patients », souligne Pierre Louis Bernard (université de Montpellier), enseignant-chercheur en sciences du mouvement humain et gérontologue . Il prépare un protocole national chez des personnes atteintes d’Alzheimer, en lien avec la Fédération française de tennis de table. Financée par France Alzheimer, l’étude va être lancée à l’automne dans cinq clubs. Une centaine de patients avec une forme peu évoluée de la maladie y participeront, dont la moitié bénéficiera de deux séances hebdomadaires de une heure et trente minutes d’entraînement, pendant trois mois. « Dans cette première étude, nous évaluerons principalement les effets sur des paramètres physiques : équilibration, locomotion, fonctions musculaire et aérobie…, précise Pierre Louis Bernard. Il y aura aussi un volet sur la qualité de vie des aidants. »

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